La question des créances en cas d’acquisitions indivises successives
Dans un arrêt du 3 novembre 2021, n°20.10-561, la Cour de cassation nous éclaire sur les règles applicables en matière de créances entre indivisaires en cas d’acquisitions successives faites en partie avec du capital personnel.
En l’espèce, Mme X était mariée sous le régime de la séparation de biens et avait acquis pendant le mariage une pharmacie à Montpellier.
Après l’avoir vendue, le solde du prix vente a servi à acquérir une maison dans le quartier « Saint-Eloi » de la même ville dont il a été indiqué que les époux étaient propriétaires indivis à concurrence de moitié (bien que le financement de la maison avait été réalisé en totalité avec le prix de vente de la pharmacie).
Plus tard, cette maison fut à son tour vendue pour acquérir un autre bien immobilier dans le quartier « Beaux-Arts » de Montpellier, les époux étant toujours titrés à égalité sur ce bien soit à 50/50.
En 2008, le mari de Mme X décède. Cette dernière a alors revendiqué une créance à l’encontre de sa succession au titre de la liquidation de leur régime matrimonial ce qui fut rejeté par les juges du fond et approuvé par la Cour de cassation.
En effet, par le jeu de la subrogation réelle, le prix de vente d’un bien indivis est nécessairement indivis de sorte qu’en faisant l’acquisition du bien sis au quartier « Beaux-Arts » avec le prix de vente de l’achat de « Saint-Eloi » les époux n’ont fait qu’utiliser un prix indivis.
L’une des possibilités pour Mme X de bénéficier d’une créance contre la succession aurait été de démontrer qu’elle avait financé le surplus du prix par des fonds personnels ce qui n’était pas le cas en l’espèce. Dès lors, aucune créance ne pouvait exister.
La question était alors de savoir ce qu’il en était du prix de vente de la pharmacie qui lui, était bien personnel à Mme X.
Ce prix ayant permis d’acquérir le bien de « Saint-Eloi », c’est à ce titre qu’une créance pouvait exister. Mais la difficulté dans cette affaire était que les acquisitions successives appartenaient aux époux à concurrence de moitié sans que ne soit mentionné le capital personnel de Mme X.
L’appelante aurait alors pu tenter de soulever la jurisprudence de 2012 (Cass. 1re civ 20 juin 2012 n°11-18.504) qui admet une « subrogation réelle de fait » en l’absence de clause de remploi dans le cadre d’un régime de communauté. Mme X aurait dû ensuite expliquer en quoi cette jurisprudence est transposable aux créances entre époux lesquelles relèvent aussi de l’alinéa 3 de l’article 1469 du code civil.
Bien qu’il n’y ait aucune certitude sur la réponse qu’aurait apportée par la Cour de cassation, il est à regretter que la question ne lui ait pas été posée.
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